Ce n’est un secret pour personne, la culture vietnamienne est très différente de ce que l’on peut connaitre en France. À ce titre, chaque pays dispose de ses propres coutumes et expressions en matière de politesse, que ce soit à l’écrit, à l’oral et même dans les comportements à adopter. Ainsi, j’ai pu découvrir au fil du temps de nombreuses différences entre nos deux pays, notamment pendant les rassemblements familiaux des fêtes de fin d’année au Vietnam. Bien que certains réflexes français soient encore difficiles à supprimer, je me suis progressivement adapté à ces nouvelles règles de bienséance.
Dans cet article, nous allons discuter des différentes formules que l’on peut utiliser pour les salutations d’usage, telles que bonjour, merci, s’il vous plait ou encore au revoir. Nous nous pencherons également sur la politesse autour des repas, mais aussi sur les choses à faire et à éviter afin d’être respectueux en toute circonstance. En théorie, à la fin de cet article, vous aurez un bel aperçu du savoir-vivre, du savoir-être et des règles de bonne conduite au Vietnam. Mais pour cela, je vous propose de débuter par une petite piqûre de rappel sur les pronoms personnels, omniprésents dans la langue vietnamienne, afin de partir sur des bases solides. Je vous invite aussi à vous renseigner sur la prononciation des mots en vietnamien, pour mieux comprendre les exemples qui vont suivre.
Préambule sur les pronoms personnels vietnamiens
Pour comprendre la notion de politesse au Vietnam, il faut que l’on pose certaines bases. Au Vietnam, les relations sociales et les marques de politesse à appliquer dépendent du « lien » entre vous et votre interlocuteur. Ainsi, on ne s’adresse pas de la même manière à nos amis, à un enfant, à nos parents ou à des personnes âgées. Grossièrement, c’est un peu à l’image du vouvoiement que l’on connait en France, qui est en quelque sorte une marque de politesse. Pour ne pas complexifier le propos, ce lien entre deux personnes que j’appelle « hiérarchique » dépend de la position occupée au sein de la famille, ou bien de la différence d’âge qu’il y a entre vous. C’est entre autres grâce à ces mécanismes que l’on détermine le couple de pronoms personnels à utiliser, en fonction du contexte présent. De ce fait, les pronoms personnels sont la première marque de politesse dans une discussion orale ou écrite entre deux individus. Pour approfondir ce sujet un brin complexe d’un point de vue occidental, je vous invite à lire notre article dédié aux pronoms personnels vietnamiens. Ne vous inquiétez pas si cela vous semble flou, l’essentiel est d’en comprendre les grands principes. Sachez que malgré mes efforts, il m’arrive encore fréquemment de me tromper dans l’utilisation des pronoms, mais comme le dit l’adage : c’est en forgeant que l’on devient forgeron !
Afin d’illustrer cet article et pour vous donner des exemples précis, je vous propose une petite mise en situation où l’on communique avec une personne vraiment plus âgée que nous, par exemple avec nos grands-parents. Ainsi, nous serons associés au pronom cháu tandis que notre interlocuteur sera respectivement ông pour un homme (notre grand-père) ou bà pour une femme (notre grand-mère). Ce scénario va nous permettre de voir les différentes marques de politesse que nous pouvons appliquer, aussi bien dans les mots que dans les gestes, dans les différentes situations que j’évoquais tout à l’heure. Ensuite, ce sera à vous d’adapter le couple de pronoms à utiliser en fonction de vos interlocuteurs, dans la vraie vie. C’est tout bon pour vous ? Alors attaquons-nous sans plus attendre au gros du sujet. 🙂
Informations générales sur la politesse au Vietnam
Pour commencer, discutons d’une double règle orale et écrite assez simple à mettre en œuvre. Lorsque l’on s’adresse à une personne étant « hiérarchiquement » au-dessus de nous, comme c’est le cas dans notre exemple, il convient de lui répondre en terminant nos phrases par la marque de politesse ạ. Dans notre contexte, une phrase toute simple comme j’aime le Vietnam (ou cháu yêu Việt Nam en vietnamien) deviendrait cháu yêu Việt Nam ạ. C’est une formule très simple à appliquer, il suffit juste d’y penser.
En parallèle, lorsqu’on répond à une question posée par quelqu’un de plus âgé, nous pouvons également ajouter dạ en début de phrase. Faites attention, dạ se dit « za » en vietnamien, je vous renvoie à notre article sur la prononciation des lettres vietnamiennes pour en savoir plus. Supposons que, dans notre contexte, nous souhaitions répondre oui à notre interlocuteur. Étant donné que les deux règles ci-dessus sont cumulables, il est préférable de répondre Dạ vâng ạ plutôt que Vâng tout seul. Facile, efficace, pour l’instant c’est tout ce qu’on aime.
En plus de ces règles de courtoisie orales et écrites, notons qu’il existe aussi des comportements physiques à adopter, et d’autres à proscrire, dont on parlera un peu plus loin dans cet article. Typiquement, lorsqu’on donne ou reçoit quelque chose au Vietnam, il faut le faire avec les deux mains : soit en prenant l’objet en question directement avec nos deux mains, soit en le récupérant d’une main tout en tenant son avant-bras ou son poignet avec sa deuxième main. C’est par exemple le cas lorsque l’on donne ou reçoit de l’argent en faisant des courses, ou comme lors du Lì Xì pendant Tết, le Nouvel An vietnamien. C’est d’ailleurs une marque de respect que l’on peut adopter peu importe le lien hiérarchique entre les deux individus.
Les salutations d’usage et le savoir-être au Vietnam
Tout en conservant ce que l’on a appris précédemment, passons désormais aux salutations d’usage, afin d’avoir un vocabulaire un poil plus adapté aux différentes situations de la vie quotidienne. Déjà, commençons par traduire bêtement les mots qui sont utilisés pour dire bonjour, merci, s’il vous plait et au revoir, comme on les trouverait certainement en utilisant un dictionnaire franco-vietnamien.
- Bonjour -> Xin chào
- Merci -> Cảm ơn
- S’il vous plait -> Vui lòng
- Au revoir -> Tạm biệt
Bien que ces mots soient génériques, ils restent tout à fait utilisables au quotidien. L’idée, c’est de vous proposer quelques variations qui feront à coup sûr leur petit effet, du style « Oh, ce Tây sait parler vietnamien ! ».
Premièrement, pour dire bonjour de manière plus élaborée, il est possible d’employer les pronoms personnels autour du mot chào, à la manière d’un « je salue toi ». Dans notre contexte, le xin chào de base se transforme ainsi respectivement en cháu chào ông ou cháu chào bà. Sachez qu’il existe une version raccourcie, principalement utilisée à l’orale, où l’on va juste utiliser le pronom personnel de la personne suivi du ạ que l’on a vu tout à l’heure, ce qui nous donne respectivement ông ạ et bà ạ. C’est typiquement cette forme que l’on va utiliser pour saluer quelqu’un que l’on croise dans la rue.
De plus, petit point rapide sur les comportements physiques à éviter. Lorsqu’on dit bonjour ou au revoir à quelqu’un, on ne fait pas la bise comme en France, que ce soit aux hommes comme aux femmes. De plus, dans notre scénario, il serait très mal vu de faire le geste que l’on fait en France, ce fameux coucou en secouant la main de loin. C’est encore quelque chose que je fais régulièrement tant c’est naturel pour un français, et ma compagne me tape toujours sur les doigts. C’est tout bête, mais au Vietnam, faites attention de bien garder ce comportement uniquement si vous saluez un enfant. Par contre, il est tout à fait possible de serrer la main de quelqu’un, principalement avec les hommes. C’est beaucoup plus rare de le faire avec une femme, mais c’est possible selon les circonstances. Néanmoins, pensez toujours à utiliser vos deux mains comme mentionné précédemment, en amenant votre main « inutile » (généralement la gauche) sur le poignet de votre autre main (donc la droite), ou sur les deux mains qui se serrent. Enfin, sachez que vous pouvez pencher la tête vers le bas, ainsi que vous incliner très légèrement tout en serrant la main de votre interlocuteur, notamment en cas de contexte hiérarchique « défavorable », c’est-à-dire quand vous êtes le plus jeune des deux personnes.
Pour les remerciements et les au revoir, on va appliquer une formule proche du bonjour, basée une nouvelle fois sur les pronoms personnels. Par exemple, lorsque l’on vous donne quelque chose, il est possible d’utiliser votre pronom suivi du mot xin afin de remercier la personne. Dans notre contexte, plutôt que d’utiliser la formule classique Cảm ơn ạ, vous pourrez alors dire cháu xin ạ. Et souvenez-vous que l’on prend les objets en utilisant les deux mains !
D’ailleurs, comme pour le remerciement, c’est cette même expression pronom + « xin » qui va nous permettre de demander quelque chose poliment. En fait, il n’existe pas vraiment d’équivalent à notre « s’il vous plait », et je n’ai jamais entendu personne dire vui lòng, qui est pourtant enseigné sur les plateformes d’apprentissage. Généralement, les personnes vont introduire pronom + « xin » dans leurs sollicitations. Ainsi, toujours dans notre scénario, la demande « donne-moi un verre d’eau s’il te plaît » devient cho cháu xin một ly nước. J’avais réellement l’impression d’être impoli en n’utilisant pas un équivalent à « s’il te plaît » dans mes phrases, mais c’est traditionnellement ainsi que la politesse se manifeste au Vietnam.
Enfin, pour dire au revoir de manière plus personnelle, on va une nouvelle fois utiliser le pronom de la personne qui part, suivi d’un verbe ou d’une action selon le contexte. Typiquement, on peut utiliser le mot về quand la personne rentre chez elle, ou bien đi làm si elle part au travail. On peut ainsi adapter notre formule « au revoir » en fonction de la situation. De ce fait, dans notre scénario, on se retrouve avec deux cas de figure distincts :
- Si c’est vous qui partez, vous pouvez dire cháu về ạ ou cháu đi làm ạ.
- Si c’est votre interlocuteur qui part, vous pouvez respectivement dire ông về ạ ou bà đi làm ạ.
Avec ces informations et ces quelques formules de politesse, vous voilà équipés pour mener à bien une conversation comme un vrai vietnamien !
Focus sur le savoir-vivre autour des repas au Vietnam
Si vous voyagez au Vietnam, vous serez peut-être amenés à manger (voire à dormir) avec ou chez des locaux, ce que les agences de voyage locales appellent par exemple « dormir chez l’habitant ». N’ayez crainte, ces derniers sont sans doute rodés à l’accueil de touristes ne connaissant ni la langue, ni les règles de politesse en vigueur, et ne se vexeront pas en cas d’erreur. Mais les quelques informations qui vont suivre pourraient vous aider à mieux comprendre certains mots ou certains gestes de vos hôtes, et à profiter pleinement de ces moments de convivialité. À titre d’exemple, je vais réutiliser mes personnages (cf. le préambule) dans le cadre d’un repas de famille. Si le sujet des repas vous intéresse, vous pouvez dès à présent lire l’article dédié à la gastronomie et au déroulement des repas au Vietnam.
Premièrement, lorsqu’on s’installe à table et avant de manger, les vietnamiens prononcent souvent une formule de politesse, à l’image d’un « bon appétit » que l’on utilise en français, même si le sens n’est pas le même. Toujours basée sur les pronoms, chaque personne va passer en revue les autres convives autour de la table pour les inviter à manger, des plus âgés aux plus jeunes, en utilisant la formule mời + pronom + ăn cơm ạ signifiant littéralement « J’invite telle personne à manger ». Ainsi, dans notre scénario, on va successivement prononcer les phrases mời ông ăn cơm ạ et mời bà ăn cơm ạ, ou bien la formule concaténée mời ông bà ăn cơm ạ comme ông et bà sont un couple de pronoms. Quant à eux, nos grands-parents répliqueront avec la phrase mời cháu ăn cơm.
Par ailleurs, pendant toute la durée du repas, il est fréquent que les personnes en invitent d’autres à manger ou à boire un verre. Pour ce faire, la personne peut par exemple prendre un des mets présents (typiquement un morceau de viande) et le mettre directement dans votre bol. Même si cela peut paraitre bizarre, ce geste est totalement naturel au Vietnam. Il ne s’agit pas de vous forcer à manger, mais simplement d’une marque de respect et d’accueil. C’est un peu comme en France, lorsqu’on propose quelque chose à boire à nos invités qui arrivent à la maison, sauf qu’ici, au Vietnam, la personne va directement vous donner la chose en question. Ce genre d’invitation à manger est principalement utilisé lors d’une première rencontre, pour mettre à l’aise le convive et l’inviter à se servir.
Au niveau des boissons, on peut également vous inviter à trinquer, d’un petit signe avec le verre ou la canette. Généralement, c’est à la personne la plus jeune de servir ou de remplir les verres, c’est-à-dire nous dans notre scénario. Une fois n’est pas coutume, il faut toujours penser à saisir et à déposer les verres à deux mains, les uns à la suite des autres. Une fois la tâche effectuée, les gens vont trinquer ensemble. À ce moment-là, il convient de placer son verre légèrement en dessous des personnes hiérarchiquement plus hautes que nous, et au-dessus des personnes hiérarchiquement plus basses, toujours à deux mains. Comme nous sommes le plus jeune de la table, notre verre doit être plus bas que tous les autres membres du repas. Ensuite, c’est encore une fois aux personnes les plus âgées de boire le verre en premier, suivi par le reste de l’assemblée. On finit généralement par se serrer la main après avoir bu un coup, toujours à deux mains.
Sachez qu’il existe également un « cri de guerre » que l’on peut prononcer entre le moment où l’on trinque et celui où l’on boit, habituellement entre amis, à l’image d’un « santé » que l’on peut dire en France. Il s’agit du hai ba zô, où l’on va successivement dire hai ba dô – hai ba dô – hai ba uống. Ce cri de convivialité pourrait littéralement se traduire par quelque chose comme « deux trois Oh – deux trois Oh – deux trois bois ! ».
Bien sûr, ce n’est pas tous les jours que l’on vit de tels moments, et les repas de la vie quotidienne d’un vietnamien à la campagne ne sont heureusement pas toujours aussi festifs et arrosés.
Finalement, que retenir de la politesse au Vietnam ?
À travers notre jeu d’exemple, nous avons pu voir les différentes formules utilisables afin de saluer nos interlocuteurs, tout en ajoutant la politesse et le bon comportement à adopter. Vous l’aurez compris, la majorité du savoir-vivre au Vietnam implique une maitrise des pronoms personnels vietnamiens, qui est de loin la facette la plus difficile de cette langue. Il faut aussi faire attention aux gestes que l’on fait machinalement en France, et se rappeler qu’au Vietnam, on interagit toujours avec nos deux mains.
Je reviendrai sans doute compléter cet article au fil de mes découvertes, en essayant d’ajouter des illustrations et des vidéos, qui sont souvent plus parlantes que de simples mots. En tout cas, j’espère que cette brève initiation au savoir-vivre vietnamien vous permettra d’être plus à l’aise dans vos discussions du quotidien, et je vous souhaite une belle découverte du Vietnam si vous venez à voyager dans ce beau pays !